Porter le deuil des « Polars Bear »
Voilà quelques jours paraissait
Hakim le Syrien, tome 10 de la série «Les Polars Bear». L'écriture
d'une autofiction s'étalant sur près de 2000 pages se révéla une
expérience profondément bouleversante: on ne passe pas impunément
quatre années à s'atteler au clavier quotidiennement sans en
revenir transformé.
Or loin de moi l'idée de promouvoir
ici l'ouvrage. Ceux qui me connaissent savent que je n'aime guère la
publicité, et qu'en bon confucéen, j'ose croire qu'on peut
s'accomplir dans l'obscurité. Du reste, sans me renier, je trouve
bien des maladresses à mes premiers tomes et un peu plus de nerf aux
derniers.
Le projet des « Polars Bear »
partait d'une double envie: prolonger la tradition du roman de gare
et insérer cette dernière dans la culture gay. La suite en procède
naturellement si bien que de mes voyages naquit l'Ourson, avatar
lointain, rondouillard et poilu de Malko Linge. On retrouve beaucoup
de l'auteur dans le physique du héros tandis que la fantaisie
nourrit les aventures: tel est le jeu de l'autofiction.
Mais de même que l'Ourson gagnait sa
vie comme sicaire et espion, je gagnais la mienne à rédiger les
romans. Le plaisir devint besogne dès le neuvième tome. Aussi
avoué-je qu'il me fallut plus de mois à achever deux livres qu'à
boucler les huit précédents. Je n'en ressentais pas moins le désir
de complaire à mon humble lectorat en menant le projet à sa fin.
Ainsi, je conçois aujourd'hui plus de soulagement que de
satisfaction à quitter l'Ourson: il m'a beaucoup appris en termes
d'écriture et d'espionnage. Mais nous subissons sans doute l'usure
de notre couple, et puisque nos dix rejetons de papier vont leur
chemin, il est temps pour nous de prendre congé l'un de l'autre.
Je ne doute pas que j'écrirai encore
-la rédaction de cet article confirme mon attachement à la
composition.- Pourtant, il convient désormais que je tourne ailleurs
mes regards. À n'en point douter s'ouvre maintenant une période de
deuil salutaire en attendant que viennent à poindre d'autres idées,
d'autres envies, d'autres projets.
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